Téhéran Tabou
ARP Selection

Trois personnages tentent de survivre dans une ville rongée par la religion et la morale. Un dessin animé qui avance entre le trip planant et la gueule de bois du réel.

Présenté à la Semaine de la critique à Cannes puis au festival d'Annecy, Téhéran Tabou arrive à la télévision, mais en deuxième partie de soirée : Arte le diffusera dimanche soir après Perfect Mothers. La rédaction vous recommande ce film d'animation choc.

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Voici la critique de Première : Tout commence par une pipe foirée : une femme monte dans un taxi avec son fils handicapé qu’elle colle à l’arrière. Elle discute du tarif, commence à s’activer, mais le chauffeur, trop vieux et concentré sur la route, n’aura finalement jamais le droit à sa passe… Dans un film iranien, ça arrache. Mais la vraie surprise vient de la forme du projet. Ali Soozandeh utilise la rotoscopie et son rendu à la limite du trip cotonneux pour décrire la réalité schizo de son pays. Le film suit trois personnages : il y a la maman putain ; un jeune musicien qui baise une femme dans des chiottes et va devoir trouver l’argent nécessaire pour lui recoudre son hymen et une jeune femme mélancolique qui multiplie les avortements. Et ce que raconte Soozandeh à travers eux, c’est les contradictions hystériques d’une société stratifiée où le sexe, la drogue et la corruption sont bien planqués sous le voile de la morale et de la religion. Les Ayatollahs gras comme des porcs changent de concubines tous les jours ; les hommes mettent en cage leurs femmes mais vont aux putes tous les soirs et la drogue s’échange sur le capot d’une bagnole.

Du réel. Dur et crade comme le bitume. Et en cherchant à le retrouver à travers l'animation, le genre le plus fabriqué, artificiel et tripant qui soit, Soozandeh ne trahit rien. Il affirme justement que seul le dessin peut rendre le sentiment de tristesse et de sidération que provoque la vision d’un pays qui marche sur la tête. Le résultat est moins théorique et moins spectaculaire que le cinéma de Folman ou de Satoshi Kon, mais on y pense beaucoup - pour cette manière de tremper le regard socio dans un univers bariolé où les personnages crèvent de solitude. On pense encore plus à Mohammad Rasoulof, dont le film, Un Homme intègre, est présenté à Un Certain regard : les cinéastes iraniens cherchent visiblement les formes les plus hallucinées pour parler de leur société hallucinante.