William Sheller

Avenet Pascal/ABACA

A 77 ans, le chanteur fait ses débuts réjouissants de comédien, dans le nouveau film de Yolande Moreau, en curé… fan de ABBA. Il nous raconte les dessous de cette première fois.

Première : Avant La Fiancée du poète, aviez- vous déjà eu des velléités d’acteur, en parallèle de votre carrière de musicien et de chanteur ?

William Sheller : Pas du tout ! Quand j’étais môme, j’ai fait du théâtre. Mais ensuite la musique m’a happé et de toute façon, entre les albums et les concerts, j’avais déjà assez de boulot ! (rires)

Comment alors vous retrouvez- vous dans La Fiancée du poète ?

Grâce à Facebook ! J’admire depuis très longtemps le travail de Yolande au cinéma bien sûr mais aussi au théâtre dans la troupe de Jérôme Deschamps et Macha Makeïeff. J’avais particulièrement adoré C’est magnifique où son potentiel comique illuminait le spectacle. J’avais envie depuis un petit moment de la demander comme amie sur Facebook mais je n’osais pas. Et puis un jour, j’ai franchi le pas. Et elle m’a répondu tout de suite ! Puis, peu de temps après, j’ai reçu un mail de ses producteurs me demandant si j’accepterais de jouer un curé dans son prochain film de réalisatrice. J’ai dit oui tout de suite !

Sans même de lire le scénario ?

Je n’avais aucune idée de l’histoire. Mais la perspective de travailler avec Yolande, de passer du temps avec elle me suffisait pour accepter. C’est elle- même qui est venue m’apporter son scénario à la maison. J’ai lu et je n’ai pas été déçu ! (rires) La folie de l’ensemble, la loufoquerie de ce curé… Tout ça donne tout de suite envie d’intégrer cet univers. Il se trouve en plus que je connais bien le monde des ecclésiastiques car j’ai été élevé par des curés...

LA FIANCEE DU POETE: UNE PARENTHESE ENCHANTEE ET ENCHANTERESSE [CRITIQUE]

Comment avez-vous travaillé à composer ce personnage ?

Mes chansons, ce sont à chaque fois des personnages qui racontent une histoire. Quand je les chante, je dois donc à chaque fois rentrer dans un personnage. Mais l’exercice était différent ici car sans la musique, ce n’est pas la même chose. J’ai eu besoin donc que Yolande me donne d’abord son idée du ton du personnage pour que je puisse m’y glisser. Et finalement, tout s’est bien passé ! Parce que Yolande a su me parler. Quand elle me corrigeait, elle partait toujours du personnage et m’expliquait pourquoi dans cette scène il devait réagir de telle ou telle manière, avoir telle ou telle intonation. C’était toujours limpide et chaleureux. Rentrer dans la peau de ce bonhomme s’est fait tout naturellement et j’ai été entouré par une équipe qui a vraiment été sympa et patient avec le débutant que j’étais. Car comme je n’ai pas passé d’essais, personne – à commencer par moi – ne savait si je serais à la hauteur.

Vous aviez le trac pour votre première scène ? Un trac différent que celui que vous pouvez éprouver lors de vos concerts ?

Sur scène, la boule de trac qui m’envahit quelques minutes avant dans les coulisses disparaît dès que j’arrive sur scène parce que soudain je ne suis plus moi- même mais une autre personne ou plus précisément les différents personnages de mes chansons. C’est forcément différent au cinéma. J’avais certes l’habitude de la caméra avec les différents clips que j’ai pu faire. Mais il y avait quand même dans ma tête sur La Fiancée du poète cette inquiétude sur ce que j’allais donner. D’autant plus qu’il n’y a pas là de public pour répondre car, sur un plateau, chacun est à sa tâche. Ma première scène a été ma rencontre sur le bord de la Meuse avec le personnage de Yolande. Je me suis lancé. On a fait deux prises. J’ai beaucoup écouté. Yolande insuffle toute l’âme de son film au plateau. Elle a cette capacité d’avoir fait d’un non- comédien comme moi un comédien, c’est dire ! Et ça a eu l’air de leur plaire. Du coup, moi aussi ça m’a beaucoup plu, d’autant plus entouré de comédiens du niveau de Grégory Gadebois… mais je ne suis pas près de recommencer ! Sauf pour Yolande bien sûr.

William Sheller dans La Fiancée du poète
Le Pacte

Vous avez dans ce film une scène-culte, celle où ce curé se met à l’orgue dans son Eglise et joue… du ABBA. Comment cette scène s’est- elle créée ?

Tout était écrit et c’est la musique qu’elle voulait ! Je ne suis pas un grand fan d’Abba mais c’était merveilleusement décalé en particulier sur un orgue totalement désaccordé qui n’avait pas servi depuis des années – et ça, ce n’était pas simple, je vous assure ! A la place d’Abba, je lui avais proposé I will survive. Mais j’ai vite compris que c’était ABBA ou rien ! (rires) Et elle a eu raison car la scène fonctionne à merveille. De toute façon, pour Yolande, j’aurais fait n’importe quoi

Qu’avez-vous ressenti en découvrant le film ? Qu’est ce que ça fait de se voir à l’écran ?

C’est affreux ! Je n’aime pas plus voir mes passages télé d’ailleurs. Je sais que Gregory Gadebois ne voit jamais ses films terminés et je comprends pourquoi ! C’est à la deuxième vision que je suis arrivé à voir le film, je crois.

Vous avez composé plusieurs musiques de films, d’Erotissimo de Gérard Pirès à Arlette de Claude Zidi. C’est un exercice avec lequel vous avez prévu de renouer ?

Non car je ne suis pas vraiment fait pour ça. J’ai du mal à créer une musique qui puisse exister derrière les images sans prendre trop de place l’étouffer. Mais je travaille par contre en ce moment à créer la musique d’une pièce de théâtre d’Aristophane.

La Fiancée du poète. De et avec Yolande Moreau. Avec aussi Grégory Gadebois, Sergi Lopez, William Sheller… Durée : 1h43