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Elle a adoré son expérience chez Marvel et ses retrouvailles avec Ryan Coogler.

A 39 ans, Rachel Morrison est nommée à l’Oscar de la meilleure photographie pour Mudbound, de Dee Rees. C’est la première femme à être sélectionnée dans cette catégorie. Elle fera face à Roger Deakins  pour Blade Runner 2049, Bruno Delbonnel pour Les Heures sombresHoyte van Hoytema pour Dunkerque et Dan Lausten pour La Forme de l'eau.

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The Playlist l’a rencontrée récemment pour évoquer cette nomination historique et revenir sur sa carrière déjà bien remplie. Car juste après ce drame indépendant, elle a signé pour Black Panther, le nouveau blockbuster de Marvel, qui reçoit depuis des critiques élogieuses et cartonne au box-office. L’intéressée détaille avec joie son travail auprès de Ryan Coogler, avec qui elle avait déjà collaboré sur Fruitvale Station, en 2014.

Black Panther est plus qu'un film (critique sans spoiler)

Rachel Morrison a commencé son travail de chef opératrice en 2005 sur le documentaire Rikers High, qui suivait des étudiants en prison et a été nommé aux Emmy Awards. Elle a ensuite signé pour plusieurs films indépendants et engagés, comme Cake (2014) ou Dope (2015), et est passée à la réalisation le temps d’un épisode d’American Crime, en 2015. Puis Marvel l’a contactée pour s’occuper de la photo de l’un de ses super-films à gros budget.
"Le mieux dans Black Panther ? C’était de retrouver Ryan, répond Morrison quand The Playlist lui demande comment elle est arrivée sur ce blockbuster. Notre but, c’était de trouver le moyen de rendre ce monde fictif réaliste, et ce même s’il comprend des éléments fantastiques. Contrairement à d’autres films Marvel, il n’est pas question de flotter dans l’espace. Ça se passe dans un pays africain fictif (le Wakanda), mais on avait toutes sortes de références en tête pour le rendre crédible : Planète Terre, Samsara, Baraka… Des films qui sont visuellement impressionnants, mais qui sont en même temps très humains."

Rachel détaille ensuite que la grande nouveauté, pour elle, était de travailler main dans la main avec les équipes chargées d’effectuer les effets spéciaux, chapeautées par Geoffrey Baumann. "J’ai souvent dû m’éloigner de la caméra pour regarder ce qui se passait du côté des VFX. Pour comprendre ce qu’on pouvait tourner en vrai et ce qui serait ajouté en post production. Une fois que j’étais plongée dedans, c’était assez intuitif, en fait. L’approche est la même, dans le fond, c’est une question de bon sens : comment faire pour réaliser cette scène de la façon la plus efficace possible ? Le plus dur, pour moi, c’était de regarder dans l’objectif et de ne pas voir directement ce que ça allait donner. C’était très différent de mes autres tournages, il y avait plus de niveaux de travail à gérer avec la seconde équipe. J’étais très intimidée au départ, car je n’avais travaillé sur un projet demandant autant d’effets visuels." Elle explique cependant qu’une fois planifié, le tournage s’est bien passé, même si elle regrette, justement, de ne pas avoir supervisé certains plans mis en scène par la seconde équipe. "Ryan voulait tourner lui-même un maximum de plans, mais ce n’était pas toujours possible. Une scène entière a notamment été filmée par la seconde équipe : la course poursuite en Corée du Sud. Et ça nous tuait de ne pas la tourner nous-même ! On avait tout préparé, on avait repéré les lieux, choisi les rues etc. Elle s’inspire de Bullitt, The French Connection et Drive. Il voulait la tourner sur un terrain en pentes, afin qu’on se rende bien compte des sauts, ça faisait une dynamique particulière."

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Rachel Morrison ajoute ensuite qu’en matière de compromis, il n’y a pas que les effets spéciaux qu’il fallait prendre en compte. La météo était par exemple assez capricieuse à Atlanta. Car si l’action du film se passe la majeure partie du temps en Afrique, l’équipe a principalement tourné au sein des studios Marvel, en Géorgie, aux Etats-Unis. Seuls quelques plans ont été faits en Zambie et en Afrique du Sud. Pour les séquences américaines, le réalisateur voulait retrouver l’ambiance visuelle de sa ville de jeunesse, Oakland : "Le grain utilisé, le côté vaporeux des lumières de la ville… c’était pour rappeler l’Oakland des années 1990". Au contraire, pour les scènes se déroulant au Wakanda, il fallait une lumière éclatante. Celle-ci a été créée en studio à l'aide de différentes sortes de spots, puis ajustée ensuite au montage. "J’aime beaucoup ce rendu : une fois en post-production, j’ai trouvé le résultat très cool." Par contre, certaines séquences planifiées en extérieur à l’aide de fonds verts ont été plus compliquées à filmer. "Le problème, quand on tourne dans une ville comme Atlanta, c’est la continuité. Le temps ne reste pas au beau fixe plusieurs jours d’affilée, il y a du vent…" Elle prend pour exemple concret les deux combats de T’Challa (Chadwick Boseman) contre M’Baku (Winston Duke) puis Killmonger (Michael B. Jordan), qui ont été tournés dans le même décor extérieur, mais sur deux journées différentes. Le premier était ensoleillé, alors que l’autre était très nuageux. Elle a alors imaginé une sorte de patchwork de protection pour que la lumière soit la même suivant les scènes. "C’est là qu’on voit que Marvel soutient ses jeunes auteurs, les aide vraiment à développer leur vision. Ils vous offrent une aire de jeux, et elle est gigantesque."

Black Panther est toujours à l'affiche. Bande-annonce :