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Ballers : le modèle Entourage à bout de souffle

Ballers : un modèle à bout de souffle

Série tapas

Cette approche, <em>Entourage</em> la doit à son scénariste, Doug Ellin, mais davantage encore à ses producteurs Mark Wahlberg et Stephen Levinson. Le premier a servi d?inspiration en puisant dans sa propre expérience de comédien et n?a jamais eu la moindre intention de se fâcher avec la grande famille du ciné US, <em>sa</em> famille. Quant à Levinson, son associé de longue date, il n?est que reconnaissance pour Hollywood, lui l?ex-agent à qui tout réussit depuis qu?il s?est calé dans la roue de son pote Mark.<em>Ballers</em> est une création de Levinson affichant fièrement en figure de proue Dwayne Johnson. The Rock incarne Spencer Trasmore, un ancien joueur de l?équipe de foot des Miami Dolphins désormais conseiller financier pour pros encore en activité. <em>Ballers</em> occupe depuis fin juin la case récréative du dimanche soir, juste après la case dépression dévolue à True Detective. Soit l?emplacement de tente attitré des productions du duo Levinson-Wahlberg. Entre HBO et ces deux-là, c?est une affaire qui roule et dont sont sortis quelques shows de prestige tels que Boardwalk Empire ou In Treatment. Mais ce qu?HBO attend vraiment de leur entreprise de catering, c?est de fournir des séries tapas fun et légères toujours élaborées selon la même recette, calquée sur un reportage de l?émission <em>Capital</em>. A savoir : la success story d?un groupe de potes, des mecs exclusivement, lancés à l?assaut d?un milieu professionnel glamour, avec force coups de pouce du destin, caméos classieux, personnages secondaires chargés et jolies filles universellement sous le charme. Après le Los Angeles d?<em>Entourage</em>, Levinson et Wahlberg nous ont aussi fait le coup du New York de la mode et de la confection hipster dans How to Make it in America. Cette fois, c?est donc la Floride et le sport de haut niveau, le plus bling de tous les décors possibles.

Football Town Nights

Les ambitions de <em>Ballers</em> se limitent à honorer son deal de série saisonnière passé avec HBO, entre blagues de gros beaufs, parties endiablées sous les palmiers et rendez-vous sur le yacht du grand patron. Pas ce que la chaîne à péage chic et intello propose de plus glorieux, mais après tout son directeur des programmes aussi a droit à des vacances. La comparaison est cruelle entre <em>Ballers</em> et la série qui occupait l?exacte même case horaire jusqu?en juin : Silicon Valley. Une autre comédie de bros, mettant en scène un crew de jeunes gars espérant se faire une place au soleil. La différence, c?est que Mike Judge, créateur émérite de satires vitriolées (<em>Beavis and Butt-head</em>, Idiocracy...) est animé d?intentions beaucoup moins amènes à l?égard du milieu qu?il ausculte. En deux saisons de <em>Silicon Valley</em>, il s?est payé tous les patrons des géants du net en battant en brèche leur image de bienfaiteurs de l?humanité. Pas dans <em>Ballers</em> que l?on risque de voir ça. Car Levinson aborde le monde du football avec la même bienveillance à la limite de l?obséquiosité que celle qui prévalait dans <em>Entourage</em> envers les studios. OK pour chambrer affectueusement les sportifs professionnels qui se conduisent en enfants gâtés, glorieusement incorrigibles, mais tout doux avec la NFL et les patrons de clubs, pourtant très critiquables dans leur façon de gérer, justement, les débordements voire les agissements criminels de leurs joueurs. Mais bon si les affaires de viol qui agitent le foot US vous passionnent à ce point, vous n?avez qu?à lire la presse, ou à regarder Amy Schumer : Dans <em>Ballers</em>, on n?est pas là pour faire de la politique mais pour se détendre à la fraîche, une Bud dans chaque main.Et aussi justement, soigner les sponsors. Parce que fidèle à une tradition de placement de produit bien rôdée dans <em>Entourage</em> (vous reprendrez bien une tequila ? oui mais alors, une Tequila Avion), Levinson réfléchit ici autant en scénariste qu?en producteur avisé et ne néglige aucun de ses partenaires : Chevrolet sert carrément d?employeur au personnage de footeux retraité  joué dans <em>Ballers</em> par Omar Benson Miller. Lequel se lancera même - eh, c?est pour le boulot ! - dans un laïus enflammé pour vanter le dernier modèle de la marque. Chez Wahlberg et Levinson, les frontières entre entertainment et branding sont très floues. Sous couvert d?explorer en insiders les milieux très fermés d?Hollywood ou du sport pro, les deux hommes n?ont jamais fait depuis <em>Entourage</em> que de contribuer à marketer les industries qui leur ouvrent bien volontiers leurs portes, en vendant du rêve plus que de la réalité. Morale de leurs histoires : au cinoche et dans le foot, tout est possible à qui s?en donne vraiment les moyens (même pas besoin en fait) avec à l?arrivée, argent (et filles) facile(s), egos boursouflés, frime et superficialité en valeur-pilier. Living the dream. Oh Yeee-eah ! 

Pascal le grand frère

On constate néanmoins une évolution notable du point de vue. Plus si jeunes, les quadras Wahlberg et Levinson ne se placent plus, comme dans <em>Entourage</em>, du côté des types encore frais et idéalistes mais d?emblée, du côté de leurs aînés, avec moins d?insouciance, un peu plus de nostalgie et même, un soupçon d?amertume. Spencer, sous ses airs de movie star bâtie comme un SUV Silverado ©, est un type un peu brisé par une après-carrière pro mal gérée qui l?a laissé en délicate situation familiale et bancaire (ça c?est ce qu?on nous dit, car vu les costards sur mesure qu?il est encore capable de se payer, il a de la marge avant de prétendre au RSA). Pour les jeunes joueurs qu?il manage, il est <em>Pascal le grand frère</em>. Désormais il opère en conseiller patrimonial autant que matrimonial, jamais avare d?une leçon de choses édifiante dispensée moyennant 3% de leurs revenus pour leur rappeler de ne pas commettre les mêmes erreurs que lui. Ironie, il les met même en garde contre leur entourage...Hypocrisie totale que cette attitude raisonnable de façade car ce qui prime dans <em>Ballers</em>, et ce sur quoi la caméra s?attarde complaisamment, ce sont les rails de coke sniffés à même les seins des groupies et les poignées de biftons jetées à la face du monde. Le plus navrant, c?est le personnage de Joe (Rob Corddry), le supérieur direct de Spencer, auquel la série accorde beaucoup trop de temps d?antenne et de parole. Un pauvre type, un peu dépassé et vulgaire, qui aimerait tellement en être de ce ballet de limousines, beuveries et jeunesse éternelle. Espérons pour lui que Stephen Levinson ne se soit pas livré là, inconsciemment, à une forme d?autoportrait.<strong><em>Ballers</em>, le lundi sur OCS City.</strong>

Avec leurs vannes de vestiaire has been et leur train de vie obscène, les héros de Ballers, nouveauté HBO pataude avec Dwayne "The Rock" Johnson, sonnent le glas d’une certaine idée de la comédie de potes. Celle que s'en font, en tout cas, les producteurs vedettes Mark Wahlberg et Stephen Levinson, déjà derrière Entourage.Entourage le film ? Une drôle d'idée en soi. Personne ne réclamait vraiment un dernier tour de stade à Vince Chase et sa bande après au moins deux bonnes saisons de trop à la télé. Passons. Mais que dans le même temps, ses producteurs dégainent Ballers, un ersatz sportif tout beau tout frais de la série, laisse à penser qu’ils ne se rendent pas compte que le monde a un peu changé ces dix dernières années. Il paraît loin le temps où le spectateur pouvait se laisser berner par la candeur d’un jeune comédien gravissant un et à un les échelons du star system hollywoodien en dépit 1) d’un "entourage"  de boulets, 2) d’un agent affligé du syndrome Gilles de la Tourette, 3) d’un talent d’acteur hautement hypothétique. Un conte de fées tournant parfois gentiment en dérision l’usine à rêves, mais sans jamais cracher dans la soupe. Grégory Ledergue