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Le troisième volet de la franchise Cars malmène son héros Flash McQueen, désormais dépassé par une nouvelle génération de pilotes. Rencontre avec le réalisateur Brian Fee.

Critique : Cars 3 évite sans problème la sortie de route

Alors comme ça c'est vous le tueur de Flash McQueen, si l'on en croit la première bande-annonce ?
Ah ah ! Après ce trailer, des enfants ont envoyé des lettres chez Pixar : "Est-ce que Flash McQueen est mort ?". Et en fait ça m'a réchauffé le coeur, parce qu'ils aiment sincèrement ces personnages, ils veulent dire quelque chose pour eux. Ça va plus loin que de les voir sur un écran pendant une heure trente. Donc non, rassurez-vous les enfants, il n'est pas mort !

Cars 3 est votre premier long-métrage. Avant cela, vous étiez plutôt chargé des storyboards chez Pixar.
C'est exact. Quand je suis arrivé chez Pixar sur le premier Cars, je ne croyais pas une seconde que j'allais finir par réaliser un film d'animation. Ça me semblait être le métier le plus difficile au monde. Je regardais faire John Lasseter (NDLR : réalisateur mais également directeur artistique de Disney Animation et Pixar) et Brad Bird… Je me disais qu'il fallait être un génie pour y arriver. Au final, je peux vous dire d'expérience que c'est très compliqué, mais qu'il ne faut pas être un génie pour y parvenir (rire) ! l faut juste savoir s'entourer des bonnes personnes. Et j'ai eu la chance de côtoyer des cadors du métier au fil des ans. J'ai appris des meilleurs.

Comment avez-vous su que vous aviez le job ?
Je ne savais pas du tout que ça allait arriver. John m'a juste convoqué dans son bureau et m'a dit que j'allais réaliser Cars 3 ! C'était un incroyable honneur, évidemment. Je savais que c'était l'opportunité d'une vie. Mais j'étais aussi terrifié qu'excité.

Vous me racontiez une anecdote amusante tout à l'heure sur vos filles qui n'aiment pas Cars, parce qu'elles estiment que c'est réservé aux garçons. Est-ce que le personnage féminin de Cruz a été imaginé pour leur prouver le contraire ?
Il y a de ça. Dernièrement, j'ai essayé de leur donner envie de jouer d'un instrument de musique, et je leur ai parlé de la guitare : "Mais ce sont les garçons qui font de la guitare". J'étais estomaqué. Tout le monde peut jouer de la guitare, enfin ! J'ai réalisé qu'elles ne voient pas beaucoup de filles qui jouent de la guitare et qu'elles ont intégré ça. Elles s'imposent des règles qui n'existent pas. Toute l'histoire de Cruz repose effectivement là-dessus, c'est un personnage féminin qui se fixe elle-même des limites par rapport au monde extérieur.

Le film est techniquement bluffant, mais est-ce que certaines idées n'ont pas pu voir le jour à cause de limites technologiques ?
Mes équipes ne m'ont jamais dit non. Mais j'ai beaucoup entendu : "Ce sera très compliqué". Prenez la séquence où Flash et Cruz se retrouvent coincés sur un terrain de Destruction Derby. Les animateurs ont dû trouver comment la boue fonctionne, comment elle bouge, sa composition… C'est la scène la plus longue de toute l'histoire de Pixar et certainement la plus chère. La plupart de notre budget effets spéciaux est passé dans cette scène. Mais tout le monde était excité à l'idée le faire.

Le ton de Cars 3 est plus sombre et le film aborde des thématiques peut-être plus adultes que les deux précédents volets. C'était l'idée de départ ?
Ça a toujours été notre objectif. Revenir aux émotions de Cars premier du nom, tout en emmenant Flash McQueen ailleurs. Il devait se confronter à quelque chose d'inédit pour lui. Et il fallait que ce voyage émotionnel soit compliqué, sinon ça n'avait pas d'intérêt pour l'évolution du personnage.

Et vous parlez à un public qui a grandi avec les personnages de Cars, qui est désormais plus âgé.
On est très conscient du fait que ces gamins qui étaient tous jeunes quand Cars 1 est sorti ont désormais une dizaine d'années de plus. C'est pourquoi ils sont maintenant prêts à voir cette histoire. Mais attention : on a toujours envisagé Cars 3 comme un film familial. D'ailleurs il ne nous est jamais venu à l'idée que les plus jeunes n'allaient pas accrocher. Les enfants sont bien plus intelligents que ce qu'on croit.

Je vois un peu Cars 3 comme une métaphore de la saga. Après Cars 2, le film semble se demander si la franchise est toujours pertinente.
La franchise va très bien, merci pour elle ! Je ne ne me fais pas de soucis pour sa santé. Donc non, je ne crois pas pas. Tout ce que je voulais, c'était dire des choses auxquelles je crois et imaginer des personnages qui me touchent. Si je ressens quelque chose, je crois que le public le ressentira aussi.

Vous diriez que c'est un film sur l'acceptation de la vieillesse ?
On pourrait dire ça, oui. Quand j'étais jeune, quelqu'un m'a dit : "Tu ne peux pas échapper au temps". Cette phrase m'est restée gravée dans la tête. On a tous une date d'expiration. Tu peux tenter de fuir pendant un moment, mais pas pour toujours. McQueen est dans le déni de sa vieillesse, il croit qu'il va pourvoir continuer à faire la course jusqu'à la fin des temps. Mais à un moment, il va se transformer, réaliser qu'il y a plus que ça. Peut-être même que sa vie ne fait que commencer.

Cars 3, en salles le 2 août 2017. Bande-annonce :