Affiche sorties de films mercredi 6 octobre 2021
Universal/ Pyramide/ Paname Distribution

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT

MOURIR PEUT ATTENDRE ★★☆☆☆

De Cary Joji Fukunaga

L’essentiel

Le dernier tour de piste de Daniel Craig en 007 cherche le fun et l’émotion, réussit parfois, mais est surtout très long

Étrangement goguenard au sein d’une série qui jouait la carte du sérieux le plus absolu depuis 2006, Mourir peut attendre est très convaincant quand il envisage -enfin !- de nouveau James Bond comme un film essentiellement très distrayant. Le problème est de rester distrayant pendant 2h43 (on compte le générique dedans). Or, sur ce point, c’est clairement loupé.

Car après un générique bordélique sans véritable idée directrice, et une heure formidablement efficace, la puissance de la franchise reprend ses droits (tout en restant curieusement très chiche en termes d’action pure), écrase littéralement Craig, et donc ce qui faisait la force de ses Bond : son individualité. Cerné par les seconds rôles plus ou moins inspirés (Lashana Lynch est une excellente sidekick, tandis que Ben Whishaw et Ralph Fiennes semblent lessivés), Craig disparaît peu à peu sous nos yeux, et le film se déroule, interminable, comme un clone de Mission : Impossible.

Au final, le sentiment que provoquera en vous Mourir peut attendre dépendra plus de votre attachement à une franchise qu’à un acteur. Est-ce que c’est une bonne nouvelle ? Pour l’industrie, évidemment oui. James Bond reviendra, plus personne n’en doute.

Sylvestre Picard

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PREMIÈRE A BEAUCOUP AIME

TRALALA ★★★★☆

De Arnaud et Jean- Marie Larrieu

Tout dans le cinéma ludique, ancré dans le réel et pourtant toujours un peu ailleurs, des Larrieu devait les conduire vers la comédie musicale. Mais à leur main, à la fois totalement dans le genre et un peu à côté donc. Soit la relation qu’entretient leur personnage principal avec l’existence. Il s’appelle Tralala, un clochard céleste qui squatte un immeuble en démolition quand, dans Paris, il a une apparition. Une jeune fille vêtue venue de Lourdes qui, s’évapore comme elle est arrivée, et qu’il va partir retrouver dans sa ville (celle, natale, des Larrieu), la cité de tous les miracles, où une famille va décider de le reconnaître comme l’un des siens. Un fils disparu depuis 20 ans et attendu comme le Messie. Les faux- semblants, les mensonges qu’on préfère s’inventer pour fuir une réalité trop morose sont au pouvoir dans cette comédie qui mêle avec bonheur les genres musicaux, chaque personnage ayant son compositeur attitré. Une polyphonie qui ne rime jamais avec cacophonie car l’art de la loufoquerie des Larrieu repose sur une grande maîtrise. Et ses merveilleux solistes (Mathieu Amalric, Mélanie Thierry, Josiane Balasko, Bertrand Belin …) donnent de la voix avec un enthousiasme généreux et une foi inextinguible dans le cinéma.

Thierry Cheze

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DELPHINE ET CAROLE, INSOUMUSES ★★★★☆

De Callisto McNulty

Tout était déjà là : ce documentaire qui suit les aventures en vidéo de l'actrice Delphine Seyrig (qui se réinvente en cinéaste féministe et voir sa carrière sabotée) et de son amie Carole Roussopoulos, ce documentaire retrace en creux les combats féministes des années 60 et 70. Et donne à la fois une sacrée pêche -par l'énergie de son actrice principale et ses positions de bon sens évident- et un bon coup de déprime -puisque tous les débats sont déjà là, depuis des décennies, et que le combat est loin d'être gagné. Place des femmes au foyer, dans la sexualité, dans les médias, dans la culture, le tout à travers l'apparition de la vidéo comme moyen de filmer en liberté... Le film aurait largement mérité de sortir de sa durée, un peu trop courte par rapport à son passionnant sujet.

Sylvestre Picard

 

PREMIÈRE A AIME

CIGARE AU MIEL ★★★☆☆

De Kamir Aïnouz

Comment s’approprier son propre désir, face à des parents étouffants à force d’inquiétude et un petit ami aimant mais trop impatient ? Voilà la question qui traverse ce premier long dont l’action se situe en 1993, au cœur de la décennie noire algérienne. Selma, 17 ans, vit avec sa famille d’origine berbère à Neuilly et voit son cocon se fissurer. A commencer par l’équilibre familial où, face à ce qui se déroule en Algérie, son père et sa mère se divisent sur la conduite en tenir : s’y installer comme acte de résistance ou rester sagement en France ? Le récit d’émancipation que propose ici Kamir Aïnouz se place donc sur un double terrain, intime et politique. Le récit s’appuie sur des personnages jamais manichéens, aimants certes mais maladroits dans leur amour, castrateurs sans s’en apercevoir. Et la cinéaste aborde frontalement la question du corps comme dans cette scène violente où Selma décide de se libérer de sa virginité avec un concombre. Dans ce rôle, Zoé Adjani impressionne par son aisance à se balader dans la multitude des sentiments contradictoires traversés par son personnage.

Thierry Cheze

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MON LEGIONNAIRE ★★★☆☆

De Rachel Lang

Ici et ailleurs. Ici c’est aussi un peu ailleurs. Et les montagnes corses finissent par se confondre avec l’immensité du Sahara. Le paysage devient mental et personnifie magistralement le récit de ce deuxième long-métrage de Rachel Lang (Baden, Baden). A l’arrière, il y a des familles qui vivent dans l’attente du retour du soldat parti au combat dans un Sahel sous tension. La légion étrangère, incarnation de la droiture militaire, propose plus que tout autre une logique de la ligne franche. Rachel Lang va toutefois montrer la porosité des choses et surtout cette altérité que l’armée ne voudrait surtout pas voir. Comment construire un foyer quand l’un de ses membres est un corps trop absent ?  Mon légionnaire montre avec beaucoup de délicatesse, de grâce et d’acuité, ce va et vient constant, entre la sphère intime à préserver mais dont on sent bien qu’elle se fissure lentement, et le champ de bataille où les affects réprimés peuvent se transformer en tension sourde. Mais c’est aussi un récit d’initiation, où comment les plus jeunes, déboussolés, tentent de prendre appui sur les plus expérimentés et parfois, les plus éprouvés.

Thomas Baurez

PETITE SOEUR ★★★☆☆

De Stéphanie Chuat et Véronique Reymond

Amies d’enfance, Stéphanie Chuat et Véronique Reymond font du cinéma ensemble depuis le milieu des années 2000. Dix ans après leur premier long, La Petite chambre, elles reviennent à la fiction avec un beau portrait de femme. Une dramaturge allemande qui a fait le choix de sacrifier sa carrière à sa famille, en suivant en Suisse son mari, directeur d’un collège huppé. Mais quand il décide de renouveler son contrat sans la consulter, Lisa se sent pris au piège, percutée au même moment par l’annonce de la grave maladie de son frère, acteur de théâtre, qui ne vit plus que pour remonter sur scène. De ces situations étouffantes, les cinéastes tirent un récit de reconstruction tout en subtilité où sauver son frère en lui écrivant un monologue revient à se sauver elle- même, en s’autorisant de nouveau une visibilité. Sans pathos mais avec un sens de la tension dans le récit, Petite sœur, porté par la toujours parfaite Nina Hoss, touche juste.

Thierry Cheze

GAZA MON AMOUR ★★★☆☆

De Tarzan Nasser

Que voit-on généralement de Gaza, sinon la détresse humaine ? Sur place, le cinéma semble donc condamné à sa seule valeur documentaire pour témoigner des bombes israéliennes qui ravagent « la Bande ». Les frères jumeaux Tarzan et Arab Nasser découverts à la Semaine de la Critique avec Dégradé en 2015, préfèrent parler d’amour. Voici Issa, un pêcheur, la soixantaine fatigué et Siham, une couturière plutôt effacée. Ils se touchent d’abord du regard. Aucun des deux n’ose croire une passion possible. Et puis il y a cette statue antique au sexe étrangement saillant qu’Issa extrait des abysses. Toute la poésie du film peut enfin s’embraser. Voici un long-métrage d’une douceur qui émane autant de la finesse de son écriture que de la grâce de ces deux formidables interprètes. Tu n’as rien vu à Gaza ? Si, un beau film d’amour.

Thomas Baurez

7 JOURS ★★★☆☆

De Yuta Murano

Une bande d'ados japonais décident de fuguer une semaine afin de goûter une dernière fois la liberté avant la rentrée et la séparation de leur petit groupe. En squattant une usine abandonnée, ils vont tomber sur un petit réfugié clandestin qu'ils vont protéger face aux forces de police. Bon, ce n'est sûrement pas pour son animation -propre mais désespérément banale- que 7 jours retient l'intérêt, mais pour son sujet et son écriture : cet éloge de la liberté et de l'accueil de l'autre résonne très fortement en notre époque, euh, compliquée là-dessus. Mais pas de pompeuse bien-pensance ici : ce sujet fournit la matière d'un réjouissant film d'aventures juvénile, où des ados utilisent leurs compétences et leur astuce pour résister aux forces de l'ordre et mener un siège en bon ordre. Liberté !
Sylvestre Picard

LE KIOSQUE ★★★☆☆

De Alexandra Pianelli

Ils peuplent les rues de nos villes depuis des années mais disparaissent peu à peu. Au bout de la chaîne de la crise de la presse, les kiosques se meurent dans une indifférence quasi générale. Fille, petite-fille et arrière-petite-fille de kiosquiers, Alexandre Pianelli en raconte le quotidien en s’installant à la place de la vendeuse avec son portable en guise de caméra. Plasticienne de métier, elle use sans en abuser de trouvailles malines dans sa mise en scène pour en raconter le fonctionnement. Le regard qu’elle pose sur les habitués comme les clients de passage n’est jamais pittoresque. Il transpire d’une humanité qui est celle des ultimes rendez- vous. Car la légèreté joyeuse qui entoure ce documentaire contraste joliment avec sa fin qu’on sait d’emblée inéluctable : la fermeture de cette institution de quartier. Être nostalgique mais jamais passéiste, voilà la force de ce Kiosque.

Thierry Cheze

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIMÉ

FATIMA ★★☆☆☆

De Marco Pontecorvo

En 1917, trois enfants portugais reçoivent la vision de la Vierge Marie qui accomplit quelques petits miracles et délivre des prophéties. Les gamins vont devenir un phénomène populaire. Ce récit des apparitions de Fatima commence sous l'angle du doute (via le personnage d'Harvey Keitel, recueillant le récit d'un point de vue sceptique), et c'est très bien joué par un tas d'acteurs bien menés (toujours un plaisir de retrouver l'excellent Goran Višnjić), et plutôt bien filmé par Marco Pontecorvo, fort de son savoir-faire de directeur photo sur Rome ou Game of Thrones. Mais en fin de compte, Fatima choisit son camp : celui d'un film qui a la foi, envers et contre tout -comme son distributeur, SAJE, spécialiste des « films d'inspiration chrétienne », et qui a récemment distribué le film anti-avortement Unplanned. Pour info !

Sylvestre Picard

 

Et aussi

Les Guerriers de l’Himalaya de Jerzy Porebski

Les Mains dans la terre, naissance d’un écovillage de Antoine Trichet

 

Les reprises

A bigger splash de Jack Hazan

La Double vie de Véronique de Krzysztof Kieslowski

Elle et lui de Leo McCarey

Ponette de Jacques Doillon

Thérèse de Alain Cavalier